Elles n’ont jamais été séparées, c’est la force de ces deux soeurs. Respectivement âgées de trente-huit et de trente-deux ans, Magalie et Claire ont eu une enfance « pas comme les autres ».
Témoignage de Magalie et Claire Delcroix, anciennement accompagnées au FAR Le Château, Pont-de-Metz
Après le décès de leur mère, les années se sont écoulées entre les séjours en familles d’accueil et la vie avec leur père qui ne sut jamais leur offrir une enfance heureuse : les violentes disputes avec celle qui partagea alors sa vie, l’alcool et les graves problèmes d’argent ont marqué les filles à jamais. Elles ne retrouvaient le sourire que le week-end quand leurs grands-parents maternels et des amis proches les accueillaient. Il s’agissait de moments d’insouciance, mais qui prenaient fin le dimanche soir quand elles devaient retourner à la maison.
Cela dura jusqu’au moment où leur père ne revint pas, laissant ses filles abandonnées à elles-mêmes. L’aide sociale à l’enfance les plaça dans une nouvelle famille d’accueil qui maltraita Claire, lui infligeant coups et vexations. Magalie, l’aînée, qui ne pouvait plus supporter cela, sollicita d’elle-même l’assistante sociale.
Une initiative courageuse qui leur a permis d’arriver au Foyer d’Aide et de Réinsertion (FAR). « Nous sommes entrées dans un univers où il fallait faire sa place. Des jeunes filles du foyer essayaient de nous tester. Il y avait une sorte de rituel dans lequel il fallait être vigilantes et ne pas se laisser malmener », explique Magalie.
Le FAR a été comme une « délivrance » pour les deux jeunes femmes. Même si ce foyer accueillait des enfants marquées par des situations très difficiles, le principe fondamental de les garder scolarisées au maximum a permis à de très nombreuses filles de garder le cap. Les différents professionnels du FAR, spécialement les éducateurs, ont été de vrais repères pour elles.
“ Il fallait que l’on se sauve…”
– Magalie et Claire Delcroix
Claire est restée neuf ans dans l’établissement et Magalie trois ans. L’accompagnement dont elles ont bénéficié leur a apporté des références communes, une sorte de normalité dans leur vie d’adolescentes : « Les professionnels nous ont permis de nous projeter. Nous avons vécu des moments inoubliables grâce aux vacances, aux séjours linguistiques, aux camps, ainsi qu’à l’humanité des éducateurs. C’est une grande chance d’avoir eu de vrais repères ! », affirme Claire.
Aujourd’hui, les deux jeunes femmes sont des modèles de réussite et travaillent toutes les deux dans l’enseignement. Claire est mariée et maman de deux garçons. Elle est aussi devenue professeure des écoles : « Je me suis inspirée de ma grande soeur », dit-elle. Elle s’est engagée dans des structures d’accompagnement, en enseignant dans un Institut Médico Éducatif (IME) ou encore dans un Institut Thérapeutique, Éducatif et Pédagogique (ITEP).
Quant à Magalie, elle ne veut pas d’enfants. Après des études de Lettres classiques, elle est devenue professeure agrégée dans un collège-lycée en plein centre d’Amiens, situé à proximité du FAR.
« Dans notre malheur, nous avons eu de la chance », s’expriment-elles. Elles ont encore quelques craintes issues de leur histoire.
Par exemple, Magalie s’attache à éviter de reproduire le schéma familial. Claire appréhende de raconter son passé à ses deux fils, même si elle compte leur évoquer cette période de vie marquante.
Les deux soeurs sont maintenant des jeunes femmes engagées et reconnaissantes.
C’est une belle histoire qu’elles nous offrent à travers ce témoignage !
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