A vingt ans, Eileen est une jeune femme épanouie. Depuis l’âge de six mois, elle n’a plus de cristallin. A l’époque, sa famille vit en Suède. Ils décident alors de revenir vivre en France pour qu’elle puisse se faire opérer de la cataracte congénitale à l’âge de quatre mois. « Lors de l’opération, nous n’avons pas souhaité qu’Eileen porte des implants car il y avait un risque d’aveuglement total en cas de blessure de la cornée » explique Manoelle, la mère d’Eileen.
Témoignage d'Eileen Leysens, accompagnée par l'IJA de Lille
Sa vision est maintenant de 2/10 (deux dixième). A l’école maternelle, il était très difficile pour elle de tenir le rythme, et rien n’était adapté à sa vue. Plus tard, il lui arrive même d’être privée de récréation pour terminer ses devoirs ! Pendant toute sa scolarité, Eileen est suivie par l’IJA de Lille, Centre d’Éducation Sensorielle pour Déficients Visuels, notamment par Annick, éducatrice, qui reste tous les jours à ses côtés. Elle apprend le piano pendant neuf ans avec Josiane, une professeure aveugle de l’IJA, qui lui enseigne cet art par l’écoute.
Elle bénéficie enfin d’une inclusion au collège Lavoisier de Lambersart et obtient son Certificat de Formation Générale (CFG), premier diplôme reconnu.
Pour la mère d’Eileen, la formation des professeurs en France n’est pas adaptée, comparativement aux pays scandinaves où l’inclusion est pensée dès la crèche : « Même si les professeurs ont énormément de volonté, il leur faut des outils adaptés ! » s’exclame-t-elle.
Actuellement, Eileen travaille pour l’Institut national de la propriété industrielle (INPI). Arrivée en qualité de vacataire, elle y réalise ensuite un stage dans le cadre de sa prépa pro à l’IJA et intègre alors le service « Titres internationaux » trois jours par semaine. Ses missions y sont variées avec la gestion des constitutions de mandataires européens et l’archivage des dossiers de marques internationales. Après cette période de stage, elle est renouvelée en CDD au sein du Pôle « Qualité des données » pour saisir numériquement les renouvellements de marques et contrôler les données avant une publication dans le Bulletin officiel de la propriété industrielle.
“Les personnes en situation de handicap ont un surcroit de motivation, elles veulent montrer qu’elles peuvent faire comme les autres.”
– Eileen Leysens
« Grâce au travail, j’ai gagné en autonomie, en confiance et j’ai rencontré de nombreux collègues » affirme-t-elle. C’est pourquoi son contrat est aujourd’hui prolongé. En 2020, l’INPI a initié un processus de recrutement afin d’intégrer définitivement Eileen. Grâce à la politique d’insertion des travailleurs handicapés menée par l’INPI et représentée par son Directeur des Ressources Humaines, Eileen a bénéficié d’une étude ergonomique pour aménager son poste de travail et lui éviter trop de fatigue au quotidien. Aujourd’hui, elle peut ainsi bénéficier d’un clavier adapté, du logiciel d’agrandissement ZoomText, de bras articulés permettant d’approcher l’écran quand elle le souhaite, d’une caméra lui permettant de numériser, d’un bureau plus grand et d’un nouveau siège…
Ce bel exemple d’inclusion a été rendu possible grâce à l’envie et l’abnégation d’Eileen. Pour elle et sa mère, il est important de lâcher du lest avec les jeunes en situation de handicap en les laissant prendre des risques. « L’échec fait partie de la vie et le risque est parfois nécessaire pour que les jeunes sortent de leur zone de confort et évoluent ». Si Eileen a un message à faire passer, c’est de parler du handicap et de faire appel à des structures d’accompagnement comme celles de l’ASRL !